Plein gris, de Marion Brunet

Emma, Elise, Sam forment un groupe d’amis très soudé dont le leader est le très charismatique Clarence. Chacun se tourne vers lui pour avoir son approbation, son affection. C’est celui qui décide et qui a toujours raison. A ce groupe vient s’ajouter Victor, nouveau demi-frère de Clarence.

Ces lycéens, fous amoureux de navigation vont vivre leur première grande aventure, partir sans parents sur un voilier, direction l’Irlande.

Mais ce voyage qui se voulait idyllique ne se passera pas comme prévu… le corps sans vie de Clarence flotte sans vie contre la coque du voilier et est remonté à bord.

Alors qu’une énorme tempête approche, les amitiés se brisent, les rancoeurs remontent et ce groupe d’amis à l’apparence parfaite ne l’est finalement peut-être pas.

Le livre alterne entre le passé, avec les souvenirs d’Emma sur la rencontre des membres de la bande et la formation du groupe -ces souvenirs qui vont arriver jusqu’au moment fatidique-, et le présent avec la lutte des amis contre la tempête et la mort.

Ce huis-clos est très poignant car les apparences sont parfois trompeuses, Clarence le leader charismatique est plein de défauts qui nous sont révélés au fur et à mesure des pages. Le drame est annoncé d’entrée et le dénouement se fera au fil de la lecture ce qui tient le lecteur en haleine.

Quand le corps apparaît à la surface, inerte, contre la coque du voilier, personne ne crie. Aucun d’entre nous. Comme si ça n’arrivait pas jusqu’à nos consciences. Comme si, en ne réagissant pas, on pouvait annuler la réalité du fait : c’est un cadavre qui remonte. Le cadavre de notre ami, pour être précise.

…voici les toutes premières lignes de ce roman redoutablement efficace… pour vous donner envie d’y plonger !

Un thriller psychologique qui ravira les jeunes (à partir de 14 ans) et les moins jeunes – lycéens comme adultes. 

Harold et Maude, de Colin Higgins

Bonjour les dévoreurs !

Afin de vous aider à choisir le programme télé des vacances et d’oublier un peu Youtube et Tik Tok.

Ou bien,  vous permettre de donner quelques arguments face à vos professeurs pour allier littérature et cinématographie….

Pour les  vacances de Toussaint, je vous propose que nous nous attaquions à des monstres de la littérature anglo-saxonne qui se sont transformés en des monuments du cinéma américain.

Je vais vous présenter trois livres, tous différents, mais tous petits (inférieur à 200 pages)

Un scénario de film qui s’est ensuite transformé en pièce de théâtre puis en roman : Harold et Maude de Colin Higgins sorti au cinéma en 1971 et édité en 1984 aux éditions Galimard.

Une pièce de théâtre de William Shakespeare Roméo et Juliette de 1597 avec plusieurs adaptations cinématographiques dont une réalisée en 1996 : Roméo + Juliette…

Et enfin Bilbo le Hobbit de l’écrivain J.R.R Tolkien sorti en 1937 et adapté en 3 films de 2012 à 2014.

Nous commençons donc par Harold et Maude qui a été écrite par le scénariste Colin Higgins après sa sortie au cinéma.

Dans la littérature d’une manière générale, quand deux prénoms, un masculin et l’autre féminin sont liés dans le titre par la conjonction de coordination « ET », nous partons du principe que ce sont deux jeunes personnes, qu’ils vont vivre une histoire d’amour impossible et qu’à la fin tout part en vrille, suicides, dépressions, meurtres et vengeances…

Et bah… pas du tout ! Harold et Maude le film est toujours classé par  american film institute ou en bon français l’institut américain du film : 45e film le plus drôle de tous les temps et 69e sur la liste des plus romantiques.

Pas mal pour un film sorti en 1971 non ?

Puis lire un livre qui commence par : Harold Chasen grimpa sur la chaise et se passa le nœud coulant autour du cou…  C’est plutôt drôle, quand on aime l’humour noir, non ?

Car oui, Harold, 20 ans, n’a qu’une idée en tête, faire tourner bourrique sa mère en simulant de faux suicides plus réalistes les uns des autres.  Il le fait avec beaucoup d’énergie, de talent et d’ingéniosité.

Ses autres passe-temps sont : se promener en corbillard dans tout New York et aller aux enterrements de personnes qu’il ne connaissent absolument pas…  Ce jeune homme est aussi joyeux qu’une porte de prison !

Puis au cours de l’enterrement d’un inconnu, il va faire la rencontre de Maude, qui elle aussi assiste en touriste à cet enterrement.

Mais, si Harold aime aller aux enterrements pour côtoyer la mort, Maude y va pour célébrer la vie !

Maude ne respecte pas les règles, elle vole des voitures en disant qu’elle les empreinte. Elle sème la police sans scrupule quand elle est poursuivie pour « emprunt de véhicule » ou non-respect des limitations de vitesse.

Elle danse, chante, pose nue pour un sculpteur de glace et déterre les arbres municipaux quand ceux-ci semblent malheureux afin de les replanter en forêt.

Alors, comment va faire Harold pour ne pas tomber amoureux de Maude ? Cette femme qui veut goûter à quelque chose de nouveau tous les jours ? Cette femme qui lui apprend la musique, à vivre, à rire ?

Malgré tout, n’oubliez pas c’est un livre avec deux prénoms et la conjonction de Coordination « ET »

Car effectivement, Harold va tomber amoureux de Maude… et Maude va avoir 80 ans à la fin de la semaine !

Donc oui, il va se passer quelque chose, MAIS vous refermerez ce livre avec le sourire, car si vous pensez que quelqu’un qui roule en corbillard va se laisser écraser par les standards de couple  vous vous trompez lourdement !

Bonne lecture les dévoreurs ou bon film !!!

La faucheuse, 3. Le glas, de Neal Shusterman


Ceci est un 3ème tome, il est donc indissociable des deux premiers. Si tu le souhaites, le tome 1 et le tome 2 sont disponibles ici même au CDI et leur analyse a déjà été faite sur le blog.

Petit rappel des tomes précédents  : Dans un monde où la mort a été éradiquée, la régulation de la population est confiée à l’ordre des faucheurs.

Maître Faraday, Faucheur expérimenté et célèbre, prend deux apprentis Citra et Rowan.

Mais, l’ordre des Faucheurs est divisé, certains se pensent au-dessus des lois vu que ce sont eux qui donnent la mort.

De fait, un groupe très violent de faucheurs mené par maître Goddard renverse l’ordre établi et fait disparaître ceux  qui se dressent contre lui.

Nous commençons ce 3ème tome trois ans après la fin du tome 2. L’autorité suprême de maître Goddard est bien installée et il a interdit d’accès le lieu où il a laissé mourir ses anciens collègues faucheurs.

Nous suivons un nouveau personnage (Jeri) un peu tête brûlée et chasseur d’épaves. Il est à la recherche d’un trésor caché dans les eaux interdites mais il va trouver bien mieux….

… Et faire revenir à la vie des personnes que Maître Goddard aurait préféré voir disparaître pour toujours.

Le Thunderhead est toujours l’intelligence artificielle qui surveille les humains. Cette dernière est fâchée depuis l’arrivée au pouvoir de maître Goddard. Il ne distribue plus aucun conseil, sauf à quelques personnes bien choisies.

Comment les anciens faucheurs vont réagir en découvrant le nouveau monde ?

Que fera maître Goddard afin de garder quoi qu’il en coûte son pouvoir sur le monde ?

Maître Faraday va-t-il enfin sortir de son silence et sa retraite ?

Le thunderhead qui se doit d’être neutre, va-t-il le rester ?

Et enfin : y a-t-il encore un avenir sur terre maintenant que la mort est vaincue ????

A toutes ces questions, tu trouveras une réponse au fil des pages de ce roman.

Pour ma part, j’ai retrouvé une écriture toujours aussi fluide avec un roman très bien construit.

Je reproche peut-être juste un peu trop de détails dans ce dernier tome, ce qui rend sa lecture plus difficile que les livres précédents.

Le fantôme de maître Guillemin, de Evelyne Brisou-Pellen

Séries noires au collège

Le Fantôme de maître Guillemin est un roman policier historique qui nous entraîne dans une histoire mystérieuse d’assassinats d’étudiants. Nous sommes en 1481, Martin Eder, douze ans, abandonné bébé par sa mère devant un hospice, se sent proche de Jésus. Il s’adresse souvent à lui. Il va recevoir une éducation privée et décrochera son baccalauréat à 12 ans, ce qui le conduira à intégrer une université. Surdoué et plus jeune que les autres collégiens, il va être malmené, moqué, harcelé. Un jour, un de ses harceleurs va être retrouvé mort, poignardé. Très vite, Martin sera suspecté. Mais une autre piste va rapidement être évoquée. Martin, qui va parvenir, malgré tout, à se faire accepter par les autres, décide de mener son enquête. Arrivera-t-il à découvrir qui sème la terreur parmi les étudiants et ainsi percer le mystère de son collège ?

Ce roman qui se déroule au Moyen-Age nous dépeint la dureté des maîtres religieux, la religion catholique occupant une place importante dans l’éducation. Le lecteur apprend beaucoup sur la vie au XVème siècle et bénéficie ainsi d’une petite leçon d’histoire avec notamment l’évocation des débuts de l’imprimerie, véritable révolution pour le monde du livre. On s’attache vite au personnage de Martin qui doit se débrouiller seul et qui devient vite la cible d’étudiants malveillants. Mais il occupera une place importante dans la communauté car grâce à lui, l’énigme va progresser.

Le garçon qui voulait courir vite, de Pierre Bottero

Ce ne sera plus jamais pareil….

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Agathe, 14 ans, et son frère Jules, 6 ans, traversent une épreuve douloureuse. Ils ont perdu leur père, mort dans un accident de voiture. Il a laissé un vide important qui leur semble insurmontable. Agathe se fait du souci pour son petit frère qui, depuis, ne parle presque plus. Elle a l’impression que la vie le quitte. Jules était dans la voiture avec son père. Par chance, il s’en est sorti. Mais le traumatisme est trop grand. Jules adore courir et là encore, toutes ses facultés le lâchent. Quand il se met à fouler le sol, il ressemble à un pantin désarticulé. A l’école, on se moque de lui. Leur mère très affectée ne peut plus faire face aux charges. Toute la petite famille va devoir quitter la maison familiale. Une vie bouleversée, une famille déchirée à jamais meurtrie. Vont-ils pouvoir se reconstruire? Jules réussira-t-il à surmonter son chagrin et sa culpabilité?

Le garçon qui voulait courir vite est un roman jeunesse très émouvant qui traite sans détour du douloureux sujet du deuil. Agathe est la narratrice. On ressent toute sa colère, son désarroi. On est sensible aux relations qu’elle a avec son frère, qu’elle protège comme une mère. La complicité, la tendresse et l’amour qui les unissent, réchauffent le cœur et les rendent très attachants. Ce roman soulève également le grave problème du harcèlement scolaire. Jules ne cesse de subir les moqueries de ses camarades. Agathe, bouleversée, devient en quelque sorte son garde du corps. Le personnage de la pédopsychiatre est très important. Une aide extérieure, quand elle est bien menée, peut conduire à des miracles en redonnant aux personnes le goût de vivre. Cette histoire se veut rassurante et pleine d’espoir.

21 jours avant la fin du monde, de Silvia Vecchini et Sualzo

En ces vacances d’été, Lisa partage son temps entre ses cours de karaté, sa jeune et solitaire amie Rima et le café où travaille sa mère… Elle vit dans un bungalow où elle se retrouve souvent seule car sa mère travaille beaucoup. Un jour réapparaît son ami d’enfance, Aless, disparu quelques années plus tôt sans laisser d’adresse… Les souvenirs laissés par cette intense amitié de jeunesse puis l’amertume de la séparation inexpliquée refont surface… Mais un secret pèse toujours sur l’adolescent qui semble l’empêcher de vivre… Et si le poids du secret était plus lourd à porter que la vérité ?

Avec ce titre, difficile de s’attendre à l’histoire proposée. Malgré l’image de couverture, je pensais ouvrir un roman graphique de science-fiction, sur le thème d’un monde post-apocalyptique… Mais ici, l’apocalypse est ailleurs, dans les secrets de famille, dans la difficulté de vivre. Le titre a pourtant sa raison d’être. C’est ce vieil homme qui circule à vélo dans la petite ville balnéaire et qui est persuadé que la fin du monde sera le 15 août. Le compte à rebours est affiché sur une pancarte accrochée à son vélo et chaque année, il recommence car les faits lui donnent tort… Pourtant, le 15 août est une date importante pour l’histoire, et vous découvrirez en quoi en lisant le livre.

Cet ouvrage a beaucoup plu à mes élèves, en particulier ceux du niveau 4e. Les thèmes abordés sont intéressants et forts : le deuil, l’amitié, la solitude, les secrets de famille mais tout se passe malgré tout en douceur. Le karaté est un fil conducteur qui déroule l’histoire grâce aux 20 préceptes de Gichin Funakoshi cités tout au long du texte. L’ouvrage se termine par un 21e ajouté à la liste par l’héroïne de l’histoire et que tout le monde devrait tenter d’appliquer, même lorsque parfois cela semble insurmontable :

« Relève-toi toujours et essaie d’être heureux ». Ce sera le mot de la fin…

La Faucheuse, 2. Thunderhead, de Neal Shusterman

Attention… Attention,

ceci est un 2e tome… il est illisible sans avoir lu le premier avant…

Alors si tu n’as pas lu le premier, je te conseille de le lire. Il est franchement très bien !

Si tu as lu le premier, mais que tu ne t’en souviens plus, petit rappel :

Nous sommes sur terre, la mort a été éradiquée ainsi que les maladies et la famine.

Afin de pallier le problème de surpopulation, une communauté est créée pour l’endiguer.

C’est la communauté des faucheurs.

Nous faisons la connaissance de Maître Faraday, Faucheur expérimenté et célèbre.

Il prend deux apprentis Citra et Rowan. Ce sont deux adolescents qui refusent en premier lieu la formation, car être faucheur revient à être exclu de la société. Leur permis de tuer fait peur à la population et leur appartenance à la communauté les oblige à porter un uniforme qui les identifie immédiatement… De plus, les jeunes gens ne veulent pas donner la mort.

Pour les motiver à s’investir dans la formation, maître Faraday les met en compétition, le vainqueur deviendra donc Faucheur et devra tuer le perdant…

Mais PATATRA… rien ne se passe comme prévu !

Le THUNDERHEAD, définition : Intelligence artificielle. Il est celui qui observe et aide les humains au quotidien, il les guide et les juge également s’ils sont dissidents. Il n’a qu’une consigne, il ne doit pas intervenir dans les affaires internes de la communauté des Faucheurs…

Un an après la fin de son apprentissage, Citra est devenue Dame Anastasia. Elle prône la bienveillance et la compassion dans son travail. Elle part vivre chez Dame Curie qui partage sa vision de la mort et qui l’accompagne dans ses débuts. Elle doit convaincre ses collègues que sa méthode de travail est viable et juste.

Or, une autre catégorie de Faucheurs menée par Maitre Goddard préfère des méthodes violentes, expéditives et spectaculaires.

Mais depuis quelques temps, un nouveau faucheur non reconnu officiellement par la communauté … rentre dans la danse macabre … L’auto-nommé Maître Lucifer. Ce dernier fait trembler les Faucheurs, car il se permet de les juger et de les tuer. Or, d’après le code de la communauté, les faucheurs sont immunisés contre la mort, ils peuvent seulement se suicider…

Puis, il y a cette Intelligence artificielle qui observe et nous donne son avis à chaque chapitre. Mais attention, petit Faucheur… que votre guerre fratricide ne vienne pas à bout de sa patience… Il ne faut jamais énerver celui qui veille sur nous tous…

L’organisation des Faucheurs pourra-t-elle survivre à sa propre arrogance ?

Ce tome est moins macabre que le 1er. On suit plus l’aspect géopolitique du monde et les ambitions de chacun, les personnages sont développés et attachants.

Ce livre est très bien écrit, il est ponctué de poésie et de sarcasme. L’intrigue est superbement bien menée, la fin est tellement imprévisible et surprenante que tu sauteras sur le 3e tome dès la fin de ce tome-ci !

Cette trilogie a obtenu le Grand Prix de l’Imaginaire 2020 ainsi que le Prix du meilleur roman jeunesse étranger.

Les fantômes d’Ebenezer Hicks, 2. Le médium- de N.M Zimmermann


Le secret du livre des morts

Joshua voit les fantômes et les esprits. Il a le pouvoir de communiquer avec eux, en particulier avec celui de sa soeur jumelle, Rose, morte dix ans auparavant. Des dons qui ont été souvent pour lui une source d’ennuis et qui l’ont conduit au pensionnat Ebenezer Hicks qui a la réputation d’être très strict. Rose est toujours présente pour son frère. Elle est à ses côtés jour et nuit. Rose, qui se déplace beaucoup, a fait la connaissance d’un bibliothécaire, Caelan, qui peut la voir et parler avec elle. Il s’avère que celui-ci possède également des pouvoirs de médium. Joshua n’est plus seul à détenir ce don et lors d’une rencontre avec celui-ci, Caelan lui apprend l’existence du livre des morts. Un livre qui révèle comment se libérer de ce don trop envahissant et angoissant, comment ne plus être le jouet des fantômes et devenir maître de son existence. Caelan va alors adresser à Joshua une demande plus que surprenante. Mais que cache-t-il réellement derrière cette requête ? Pourquoi se servir de Joshua ? Caelan ne dirait-il pas tout aux jumeaux ? Les deux
adolescents avides d’aventures vont se trouver mélés à des affaires qui vont les dépasser.


Je dois préciser que les romans sur le thème de la mort, des fantômes et des esprits ne font pas partie de mes lectures habituelles. Mais là, je suis surprise d’être rentrée si rapidement dans l’histoire ! Beaucoup d’empathie pour deux personnages très touchants, Joshua et Rose dont la complicité et l’amour fraternel sont des plus forts. Ils ont un caractère très différent mais ils savent être complémentaires. Le deuil est compliqué et la mort est difficilement acceptable. Joshua acette chance de pouvoir parler avec l’au-delà et de continuer d’une manière différente une relation avec sa sœur. On peut se demander que serait Joshua sans Rose d’ailleurs.
N.M Zimmermann ne nous livre pas pour autant un récit larmoyant ou un roman noir, bien
au contraire ! Le duo est dynamique, l’atmosphère peut être légère et teintée d’humour
parfois.
Si l’on n’a pas le choix, on peut découvrir le tome 2 sans avoir lu le tome 1, ce qui fut mon cas. On comprend très
vite la situation. Le nombre de pages ne doit pas être un frein à la lecture car on se laisse très vite happé par le récit dont le dénouement est surprenant et inattendu. Je dois vous confier que je n’avais pas imaginé d’ailleurs une telle fin ! J’ai vraiment apprécié ce moment de lecture et j’attends avec impatience de pouvoir me plonger dans le tome 3.

La faucheuse, de Neal Shusterman

La FaucheuseLa Faucheuse

Dans un futur proche, les progrès de la médecine ont permis la fin de la mort naturelle. Au lieu de vieillir naturellement, il est possible de rajeunir autant qu’on le souhaite. Néanmoins, ces progrès apparemment bénéfiques ont la néfaste conséquence d’augmenter la population mondiale : des faucheurs, êtres supérieurs choisis par un conseil, tuent alors de façon aléatoire, selon un tirage au sort. Citra et Rowan, deux lycéens, ont été choisis pour devenir des faucheurs. Seul l’un d’entre eux arrivera à cette distinction suprême.


Dans un entretien au Monde du 19 mars 2018, Neil Shusterman, auteur de La Faucheuse, ayant pour sujet cette intrigue, relate : « Ecrire sur la mort n’était pas difficile, parce que j’ai eu l’impression d’écrire à ce sujet de façon responsable et prudente ». Prudence, c’est le mot : tout le monde nait, vit, meurt. Rien de plus prudent que cela. Une pandémie mondiale causée par un virus incontrôlable allait certainement redéfinir le terme de « prudence » dont parle Neil Shusterman dans cet entretien au Monde.
La Faucheuse est une dystopie : une société imaginaire régie par un pouvoir totalitaire ou une idéologie néfaste, telle que la conçoit un auteur donné, selon Le Grand Larousse Illustré. Dans le livre, le Thunderhead (pas loin de notre Cloud actuel) régit nos vies. Tout le cadre d’une comédie américaine est réuni : il y a le quaterback du lycée, les adolescents harcelés mais cools, la faucheuse qui s’invite à dîner pour en fait ne faucher personne car, selon ses dires, « Je suis venue glaner votre voisine, Bridget Chadwell. Mais à mon arrivée, elle n’était pas rentrée chez elle. Et j’avais faim » (p.21). En mars 2018, on rit. On trouve cela cocasse, osé : en fait, la mort vient dîner quand cela sent bon dans le couloir. Or la lecture d’une telle dystopie ne peut que chiffonner le lecteur de 2021. L’irruption de la mort dans notre quotidien n’a plus rien de cocasse, d’osé. Mauvais timing pour l’auteur ? Non, le livre a été écrit pré-pandémie.
D’autre part, je regrette l’utilisation du terme « glaner », qui sert ici de manière pour dire que la faucheuse tue quelqu’un. Je préfère la référence aux Glaneurs et à la glaneuse, d’Agnès Varda, bijou de film sensible, poétique, qui donne la parole aux travailleurs des champs. Ou encore au combat de certains hackeurs/universitaires pour faire d’internet un « commun »: cette terre où pouvaient être glanées, c’est à dire ramassée librement par les paysans, les récoltes des cultures des seigneurs du XIIème siècle. Loin des starts-ups, loin d’un Internet marchand ubérisé qui ne vise qu’au profit, Internet doit être un commun, comme la fiction doit être un combat. On renverra à l’association La quadrature du Net, qui œuvre en ce sens (https://www.laquadrature.net/). Voilà le glanage que l’on souhaite voir dans un roman destiné aux adolescents : étymologique, idéologique.


Cette société future, décrite en 2018 par Neal Shusterman, on l’a compris, c’est la nôtre. Le lecteur adolescent à qui s’adresse ce livre doit être informé des questions éthiques que pose l’intelligence artificielle : données personnelles, l’allongement de la durée de vie par les progrès de la médecine. Or, si ces enjeux ô combien importants l’étaient dans le passé, comment les aborder aujourd’hui ? Le contexte de pandémie lié à la COVID-19 ne rebat-il pas les cartes, finalement, jusque dans la fiction proposée aux jeunes ? Plus largement, comment la fiction traitera t-elle des sujets comme ceux que traite La Faucheuse de Neal Shusterman, dans un monde post COVID-19 ? Reste à lire le prochain livre de Neal Shusterman afin de -tenter- trouver une réponse.

Une enseignante de français

Ce roman a obtenu le Prix des lecteurs R 2018, le Prix Histoires d’ados 2019 et le Grand Prix de l’Imaginaire 2020

Deux graines de cacao, de Evelyne Brisou-Pellen

La révélation…

Alors qu’il apprend qu’il a été adopté à Haïti, Julien, jeune Breton de 12 ans, se met en tête de retrouver ses parents biologiques. Il va alors fuguer de l’internat aidé par Gabriel, un élève aide-infirmier. Tous deux décident  de se faire engager sur un bateau de marchandises, direction Haïti. Julien laisse tout derrière lui, bien décidé à découvrir ses origines.

Julien est violoniste. A bord, il est chargé de divertir des hommes, des femmes et des enfants. Mais quel effroi quand il apprend que tous vont être vendus. Triste destin pour ceux qu’on traite comme du bétail. Gabriel, lui, doit veiller que les esclaves arrivent à bon port en forme. Les deux adolescents ne s’attendaient pas du tout à ce genre de traversée.

Une traite d’esclaves noirs cruelle, des conditions de captivité indignes. Julien et Gabriel vont prendre  conscience de la tragique réalité endurée par le peuple noir et de la cruauté d’hommes, qui n’ont de cesse de pratiquer ce commerce de malheureux subissant maltraitance et humiliation.

Deux graines de cacao est un roman à la fois initiatique et historique :

– Historique car il nous dévoile l’horreur vécue par tous ces esclaves noirs qui essaient de survivre aux atrocités infligées par des hommes qui se croient supérieurs. Le récit se passe en 1819 alors que la traite négrière est abolie en France depuis 1815. Julien, témoin de cette époque, va nous embarquer dans une longue et triste traversée.

– Initiatique car le jeune héros est en quête d’une identité.

Evelyne Brisou-Pellen nous emmène au plus près de la réalité des faits en employant notamment du vocabulaire de l’époque.