Le garçon qui voulait être un chat, de Véronique Foz

Ilyan n’est pas un garçon comme les autres. Bébé, ses crises à répétition, son retard de langage, sa difficulté d’être avec les autres finissent par alerter son institutrice et ses parents. Le diagnostic tombe : Ilyan a le syndrôme d’Asperger, un trouble autistique. La vie de la famille en est entièrement chamboulée. Mais dans la vie de Ilyan, il y a les chats, qu’il adore (à vrai dire, il pense même en être un, coincé dans un corps d’humain à la naissance, mais ça, c’est un secret…) , et Papijo, son grand-père maternel, toujours là pour l’encourager et le comprendre… Mais Papijo commence à perdre la mémoire…

Un nouveau titre de la collection AdoDys, une collection mettant en scène des enfants neuroatypiques dans un format adapté aux lecteurs dyslexiques. Une histoire touchante, bien écrite, qui a pour objectif de faire comprendre et accepter la différence, vue comme une force et non une faiblesse. Les problèmes de vie sociale que rencontre Ilyan, autiste Asperger est bien expliqué sans que le ton ne soit trop didactique ni complaisant. L’amitié en Ilyan et Sol est très belle et d’autres thèmes comme l’écologie, le harcèlement ou encore la vieillesse sont également abordés. Une collection dont il est intéressant d’avoir quelques titres dans les bibliothèques et CDI.

Nuit noire, de Lynn Beach

De l’autre côté du pont, de Padma Venkatraman

Rukku, handicapée mentale et Viji, sa soeur de 11 ans, vivent à Chennai, en Inde avec leurs deux parents. Malheureusement, leur père est violent et leur mère résignée. Pour ne plus subir les coups et les insultes, elles fuguent. Vivre dans la rue, ce n’est pas simple, mais leur vie devient plus agréable lorsqu’elles rencontre deux garçons vivant dans la rue depuis longtemps. Mais dans ce milieu hostile, il y a la faim, le manque d’hygiène, les guerres de territoires et la maladie. Et lorsque cette dernière s’en prend à eux, vivre dans la rue sans argent n’est plus possible. Où iront les quatre amis ? Quels sacrifices seront nécessaires ? Les quatre enfants survivront-ils ?

J’ai aimé ce roman parce qu’il est émouvant et inspiré de témoignages réels, souvenirs de la jeunesse de l’autrice. Il est vraiment touchant et plonge le lecteur au cœur de l’Inde.

Il contient certains mots en tamoul (langue parlée en Inde) mais un lexique est présent au début du livre pour aider le lecteur. Malgré cela, il est facile à lire et adapté aux lecteurs dès la 6ème, même s’il peut aussi se lire plus tard.

Ce livre a été récompensé de nombreuses fois aux USA et mérite ces prix, je vous le conseille fortement !

Remerciements :
Les quatre amis m’ont été inspirés par des enfants que j’ai connus en Inde quand j’étais jeune. J’avais promis à l’un d’entre eux qu’un jour, j’écrirais leur histoire […]

Manon, 5ème – membre des Dévoreurs de livres d’Arsène

Otis, de Yannick Beaupuis

Ulysse est un garçon très solitaire, incapable de communiquer avec les autres. Diagnostiqué autiste-asperger, il a du mal à être accepté à l’école, malgré la compréhension et la bienveillance de sa maîtresse. Pourtant, un événement va bouleverser son quotidien.

Otis, lui, évolue dans un monde fantastique, peuplé de créatures hybrides mi-hommes, mi-animaux et dirigé par l’intendant-général, le redouté Taurus, l’hybride buffle. L’enfant est ami avec Lou l’homme-loup, Ursul l’homme-ours et Mina, la femme-féline. Ils vivent dans un village-campement, pris en étau entre l’Arbre-source incandescent et la forêt d’ombres redoutables. Pour sauver leur monde, ils vont devoir affronter de terribles épreuves, dans un monde où l’on va croiser de nombreuses créatures de la mythologie grecque : Athéna, la Pythie, Thésée et sa toison d’or, le sphinx et son énigme, le Cyclope …

Deux histoires qui se mélangent sans presque jamais se rejoindre, qui semblent évoluer dans deux univers différents qui pourtant se complètent, se relient par des liens impalpables. Otis a une sonorité proche de autisme. Ulysse, le prénom du garçon est un rappel à la mythologie grecque qui accueille le monde d’Otis.

Un texte très exigeant dont le thème principal est le dépassement de soi par l’épreuve et l’acceptation de la différence. La majorité du texte évolue dans le monde d’Otis. Le monde d’Ulysse est beaucoup moins présent. Je l’ai un peu regretté car je me suis particulièrement attachée à ce garçon atypique féru de mythologie et à sa jeune amie Charlotte, capable de dépasser tous les préjugés avec naturel et bienveillance. Ce parti pris de l’auteur ne laisse pour moi aucun doute sur le fait que le monde d’Otis représente le monde intérieur d’Ulysse, bien plus présent et plus supportable pour lui au quotidien que son monde réel, douloureux, dans lequel il ne trouve pas sa place. Chaque action d’Ulysse dans la vraie vie est en lien avec une action d’Otis dans le monde imaginaire, une transposition de la réalité dans un monde parallèle. D’où la complexité du récit et de sa construction extrêmement travaillée, car cela n’est jamais dit de manière vraiment explicite. Dans un même chapitre, les deux histoires sont présentes, la séparation étant matérialisée par un signe typographique. Un texte qui mériterait une deuxième lecture pour en savourer tout le sel et toute la richesse.

Si par hasard l’auteur de ce roman lit un jour ma chronique, je serais ravie de le voir mettre un commentaire de son livre sur notre blog pour nous offrir son éclairage personnel.

Le sagouin, de François Mauriac

Le souffre douleur

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Le Sagouin c’est Guillaume, un enfant rejeté par sa mère, Paule, une roturière. Guillaume est sale, laid et sa mère ne supporte plus de le voir si bête et si malpropre. Elle a épousé le père de Guillaume, Galéas de Cernès, pour avoir le titre de baronne et sortir de son milieu social d’ouvrier. Ce dernier est un homme de très bonne famille, au physique disgracieux. De cette union improbable est donc né Guillaume. Tous vivent dans le château familial, où seule la grand-mère règne. Celle-ci n’accepte pas le mariage de son fils avec Paule. Le jeune garçon de 12 ans n’est toujours pas scolarisé car personne ne veut l’accueillir .L’instituteur du village lui reconnaît pourtant des qualités mais l’enfant n’attire que maltraitance et dégoût. Guillaume souffre beaucoup de toutes ces moqueries et des rejets dont il fait l’objet. Il est mal aimé par une mère qui n’a aucun geste de tendresse. Elle a autant de répugnance pour son mari que pour son fils. Quant au père, il ne sait pas tenir tête à sa femme.

Un roman fort de François Mauriac qui dépeint la maltraitance et la souffrance psychologique d’un enfant. Une histoire cruelle qui me fait beaucoup penser à Vipère au poing de Hervé Bazin. Une mère tyrannique, un père mou, soumis. Le Sagouin c’est aussi tout le supplice d’être différent. Dans cette histoire, chaque personnage a ses souffrances, ses blessures qui les enferment dans une solitude et malgré tout, ils doivent vivre ensemble. Ici pas question d’amour, de tendresse, les cœurs sont froids, durs. Guillaume et son père Galéas nous emmèneront vers une fin tragique, bouleversante et terrifiante.

Le Jardin Secret, de Linda Chapman

Mary Lennox a dix ans lorsque ses parents meurent du choléra suite à l’épidémie qui ravage les Indes. Mary se sent coupable.

Recueillie par son oncle, elle vit désormais dans son château en Angleterre. A l’image de sa maison, le propriétaire des lieux, M. Craven, est froid et austère avec sa nièce. De plus, d’étranges cris hantent les nuits… Après plusieurs explorations, Mary découvre son cousin « bossu », Colin, qui vit reclus, et qui est incapable de marcher.

La fillette est attirée vers cet exterieur si vert, vers ces landes brumeuses et les forêts enchantées. Dans la forêt, elle rencontre une chienne, qu’elle appelle Jemima, qui deviendra sa seule amie dans cet endroit si différent des Indes. Elle découvre alors un jardin, un jardin secret et magique. Le jardin pourrait-il sauver son cousin ?

J’ai beaucoup aimé ce livre, qui est le roman du film du même nom. J’ai vu il y a quelques années la version de 1993 en dessin animé que j’avais trouvé incroyable. En 2020, une nouvelle adaptation est sortie, de ce roman de littérature jeunesse publié pour la première fois en 1911 et écrit par l’écrivaine Frances Hodgson Burnett. Mary, qui m’a en premier lieu paru arrogante, démontre finalement un grand coeur, et une immense détermination. Le personnage qui m’a le plus plu est Dickon, un jeune jardinier très doué, qui possède une grande imagination. Il arrive même à supporter Mary et son arrogance, je l’admire beaucoup pour ça (personellement, je ne pourrais m’empêcher de la remettre à sa place !). Ce livre est tout simplement parfait pour s’évader un moment. Et pour ceux qui n’aiment pas énormément lire, partez à la découverte du film !

Eléa

Caméléon- les filles Asperger déboulent- de Christine Deroin et Gilles Martinez

Je suis une fille et autiste … et alors ?cameleon.jpg

Alice est une adolescente de 13 ans, elle a une soeur qui entre au lycée. Toute la petite famille va déménager et il est certain que quitter les amis, un quotidien bien rôdé, n’est pas chose facile. Mais quand on est jeune, on s’adapte facilement et des camarades, on peut s’en faire partout. Oui mais pas quand on s’appelle Alice. Alice est timide, elle a un haut potentiel intellectuel certes, mais elle est toujours seule. C’est bien connu, on a tendance à trouver ça normal, la solitude, pour les « intellos »! Ses parents, les enseignants la disent à part. Personne ne s’en étonne, c’est sa personnalité après tout.

Alice fait sa rentrée et rencontre Fanny, une élève qui est dans la classe de sa soeur. Cette rencontre va être le début de grands bouleversements…

L’histoire d’Alice est l’histoire de beaucoup d’autres individus atteints de troubles du spectre autistique. Une histoire bouleversante et sensible qui montre la difficulté d’intégration pour les personnes souffrant de ce handicap. Malheureusement, le diagnostique est parfois difficile à établir notamment chez les filles car on pense d’avantage à de la timidité.

Une fois des mots posés sur le trouble, beaucoup de choses s’expliquent. En milieu scolaire, des aménagements sont effectués pour rendre moins difficile une intégration mais il reste encore beaucoup à faire..

Caméléon est un livre qui parle le plus simplement possible du trouble du spectre autistique.  Comme d’habitude dans la collection saison psy: une fiction et l’oeil averti d’un spécialiste pour nous aider à comprendre, des adresses utiles d’associations ou de lieux d’accueil.

 

Comment je suis devenue UN ROBOT, de Nadia Coste

 

Margot est en 4ème. Un matin, en arrivant au collège, elle est percutée par une voiture. Sa vie bascule irrémédiablement. Amputée d’un pied et d’une main, elle devra apprendre à accepter ce  corps mutilé, ses prothèses, le regard des autres. Est-ce en se fabriquant une armure et en éradiquant toute émotion, tel un robot, que Margot réussira à surmonter cette difficile épreuve ? Heureusement Ambre, sa meilleure amie, est là, qui veille, fervente défenseuse de l’identité et des différences. Personne n’a un corps parfait, le tout est de s’aimer tel que l’on est, peu importe ce qu’en pensent ou disent les autres.

Une histoire sur un sujet difficile : comment accepter le handicap après une amputation et ─ encore plus compliqué ─ quand on est adolescente ? L’auteure, par les mots de Margot et Ambre, les narratrices, décrit très bien les phases que traverse la jeune ado. La perte de ses membres lui fait vivre ce qu’on appelle un processus de deuil. Face à une situation insupportable, l’esprit met en œuvre des mécanismes de défense, de façon inconsciente : déni, colère, marchandage puis repli sur soi avec la prise de conscience du caractère définitif de la situation, avant d’atteindre la phase finale de l’acceptation.
Dès les premières pages, Margot nous livre ses sentiments :  » Si seulement je pouvais me faire engloutir par le matelas et disparaître une bonne fois pour toutes, ce serait moins difficile que d’affronter cette vie qui m’attend !  » Elle refuse ce nouveau corps imposé, elle voudrait ne pas regarder ni nommer son « moignon » :  » Je suis obligée de voir ce… truc, là « …Et encore moins le toucher.
Quand Margot préfère se forger une armure et faire taire toute émotion, seule façon pour elle de
surmonter l’épreuve, c’est un mécanisme de défense également. On voit petit à petit le processus
s’accomplir, et on comprend comment Margot est devenue un robot.

En lisant ces pages, le lecteur entre dans l’intimité de la jeune adolescente, témoin direct de ses ressentis et d’un quotidien où tout a changé. On devine aussi le poids du traumatisme pour l’entourage. Comme Margot est narratrice, on ne connaît les sentiments de ses parents que par la description qu’elle en donne, et cela sonne parfaitement juste.
La seconde voix de ce roman, c’est Ambre. Une amie au franc-parler et au soutien indéfectible, qui raconte aussi les difficultés de l’adolescence. Le lecteur connaît alternativement le point de vue de l’une puis celui de l’autre. Et finalement apparaît un point commun dans les deux récits : la question de l’estime
de soi. C’est bien de cela qu’il s’agit, au fond. L’estime de soi passe par l’acceptation de l’image corporelle, image qui va être modifiée tout au long de notre vie. Ambre doit accepter une poitrine volumineuse qui la met mal à l’aise, Margot doit réinvestir ce corps qu’elle ne reconnaît pas. L’infirmière de Margot le dit, très tôt dans le récit :  » Mais c’est ton corps, tu sais. Accident ou pas, il change tout au long de ta vie, et à l’adolescence en particulier. Même s’il n’est pas parfait, tu n’en as qu’un : c’est en l’acceptant comme il est que tu pourras te sentir bien dans ta peau. « 

Comment je suis devenue un robot, un livre sur le handicap mais aussi sur le rapport au corps pendant l’adolescence, avec en toile de fond une jolie histoire d’amitié.

À lire sans tarder !

 

À noter :
Ce livre a fait l’objet d’un travail collectif auprès d’écoliers, collégiens et lycéens, le Feuilleton des Incos. Mis en place par l’association des Incorruptibles*, le Feuilleton des Incos met en relation des auteurs et des classes. Le but est de découvrir les coulisses de la création littéraire, au moyen d’une correspondance
avec l’auteur et d’une lecture par épisodes d’un roman en cours d’écriture.

*Les Incorruptibles : Association créée en 1988 avec la collaboration de Françoise Xenakis, qui a reçu l’agrément de l’Éducation Nationale en 2013, et dont l’objectif est de susciter l’envie de lire chez les plus jeunes.

Le garçon qui parlait avec les mains, de Sandrine Beau et Gwenaëlle Doumont

Le langage du coeur

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Victoria est ravie, la maîtresse a présenté à la classe un nouvel élève. Il s’appelle Manolo et la petite fille tombe immédiatement sous son charme. Manolo est espagnol, craquant mais…. il est sourd et communique uniquement avec les mains. Par chance, la maîtresse connaît la langue des signes, ce qui étonne tous les élèves d’ailleurs. La présence de Manolo va soulever des protestations et des hostilités de la part des parents qui voient d’un mauvais œil son arrivée, par crainte que son handicap accapare trop l’institutrice ou ralentisse l’apprentissage de leurs enfants. Par ailleurs, une réelle amitié naît entre Victoria et Manolo, ils deviennent inséparables. Alors que certains vont l’aider à s’intégrer, d’autres vont se moquer. Victoria va alors mener un combat pour faire changer les comportements et le regard sur son ami.

Le garçon qui parlait avec les mains est un petit bijou. C’est un roman jeunesse qui pousse la porte du handicap, notamment de la surdité. Il nous fait ressentir les difficultés à s’intégrer pour la personne différente et les réactions des gens dits «normaux». Des réactions négatives pour certains car ils ne comprennent pas le handicap. L’inconnu fait peur et de là naissent les préjugés. Cet ouvrage est juste et très réaliste et pourrait servir de base aux enseignants pour expliquer l’importance de l’intégration des élèves différents, l’importance du vivre ensemble. Sandrine Beau nous fait également une petite initiation à la langue des signes qui, je trouve, devrait avoir sa place au sein des programmes scolaires.

Cette année au collège, une interventant extérieure est venue proposer l’apprentissage de la langue des signes aux élèves sur la base du volontariat. C’est ainsi que j’ai eu la chance d’intégrer ces cours et ce fut un réel plaisir. Tellement enrichissant et expressif ! Une transmission des émotions particulières car tout passe par le visuel, l’expression du visage étant très importante. C’est pourquoi aussi ce livre est d’autant plus important pour nous !

Il faut signaler également les belles illustrations fraîches et colorées qui donnent à ce roman tout son sens. Un gros coup de cœur pour ce superbe roman.

Tout ce que j’aurais dû savoir, de Claire Lazebnik

Maître de son destin…

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Chloé est une adolescente populaire et très sûre d’elle. Elle a une sœur de 21 ans, Ivy, qui est autiste. Chloé est très protectrice et ne veut pas que cet handicap soit un frein à tout lien social. Chloé se met en tête de trouver un petit ami pour sa soeur. Son choix va se porter sur Ethan qui n’est autre que  le frère de David, un élève de sa classe, peu aimé car très méprisant. Mais Ethan et Ivy ne sont pas à l’aise pour sortir seuls. Pour favoriser un éventuel début d’histoire, Chloé et David vont devoir les accompagner et donc passer beaucoup de temps ensemble.

Le fil conducteur de ce roman est le lien presque fusionnel entre les deux sœurs. Le sujet délicat qu’est l’autisme met en parallèle deux binômes , David et Ethan, Chloé et Ivy. Beaucoup de réalisme et d’émotions de part et d’autre, de jolies leçons de vie. S’en dégagent aussi la difficulté à affronter le regard des autres, les maladresses et les incompréhensions dont peuvent faire preuve les familles. D’où la difficulté pour les personnes autistes à trouver parfois leur place aussi bien dans la société qu’au milieu de leurs proches. Les personnages qui gravitent autour des protagonistes amènent leur lot de préjugés.

Une belle histoire qui prouve qu’on ne peut pas aller contre la nature des êtres et qu’il faut que chacun fasse son chemin en suivant ses propres convictions.