La course au Pôle sud : Amundsen et Scott, de Sylvie Baussier

La guerre des Pôles

Année 1911. Roald Amundsen est amer. Lui qui caresse depuis longtemps le projet d’être le premier à atteindre le pôle nord, voit son rêve s’écrouler. Mais il ne se résigne pas pour autant et si le pôle nord est pris, il lui reste le pôle sud. Alors, sans en avertir son équipage, le Norvégien décide de changer de cap. Il n’ignore pas que ce ne sera pas chose facile de ce côté du globe car les conditions climatiques sont extrêmes et il y fait nuit une grande partie de l’année. Il sait qu’un autre explorateur, Robert Scott, prépare déjà depuis longtemps une expédition dans ce pôle. Mais qu’importe, sa soif de grands espaces, de défis toujours plus grands, de victoires, l’emportent sur le reste. De son côté, Scott trépigne d’impatience d’aller à la conquête d’un lieu que jamais personne n’a exploré. A lui la gloire et les honneurs ! Alors, quand il apprend qu’il est doublé par Amundsen, cet anglais de quarante deux ans est dévasté. Très vite, il reprend ses esprits et décide de tout donner  pour y arriver. Les deux hommes et leur équipe vont désormais s’affronter dans un duel à travers les grands espaces blancs et froids. Lequel foulera le premier le sol de l’Antarctique et à quel prix ? 

Sylvie Baussier nous raconte une double expédition vers le Pôle sud, alternant l’une puis l’autre à chaque chapitre. Des aventures parallèles menées d’une part par des Anglais organisés et de l’autre par des Norvégiens qui font confiance avant tout à leur instinct et leur expérience du grand Nord. Sans entrer dans des détails trop techniques, l’auteur met en lumière toutes les difficultés d’une telle équipée et nous fait partager toute la détermination de ces hommes prêts à payer de leur vie une passion dévorante. Une aventure humaine hors du commun.

Chère maman, de Sylvie Baussier

Une femme, mère d’une adolescente de 12 ans, décide de commencer un journal intime sous forme de lettres adressées à sa propre mère. Elle ne pense pas être capable d’envoyer un jour ces lettres mais a besoin de mettre des mots sur la douleur ressentie depuis toujours face à la froideur de sa mère à son égard, à une mère qu’elle n’a plus jamais appelé « maman » depuis l’âge de huit ans. 

Tu es une pierre dans l’eau froide d’un torrent. Tu es le métal qui colle à la main quand on veut le retirer du congélateur, qui arrache un lambeau de peau et un cri d’effroi. Tu es mon étrangère.

Je suis censée être une adulte, depuis longtemps. Je suis même devenue maman. Et pourtant, ce vieux chagrin est toujours tapi en moi ; parfois il se redresse et réclame son droit à me pourrir la vie. J’ai à la fois deux ans, huit ans, quinze, vingt, trente… Nous sommes tous nos âges à la fois, n’est-ce pas ?

Un jour, son carnet, si précieusement gardé dans une poche secrète de son sac, disparaît…

Un récit très court, à deux voix, celle de la jeune mère qui écrit ses lettres en commençant par un « Chère maman » distant et celle de sa fille, une adolescente de 12 ans, qui, elle aussi, va écrire des lettres à sa mère, les commençant par un « Mamounette chérie » complice et tendre.

Deux vécus très différents d’une relation à la mère qui construit l’adulte de demain. Sans violence, avec compréhension et espoir malgré le manque de tendresse, la jeune femme se raconte, avec ses failles et ses douleurs, dans sa quête profonde d’un amour maternel absent. C’est sa fille adolescente qui lui permettra d’affronter ses démons et de mieux comprendre et vivre son histoire.  Il n’y a pas seulement la violence physique qui peut créer une douleur dans sa relation au parent. La froideur, le manque de tendresse peuvent être un frein tout aussi puissant à la construction de soi et  rester présent à l’âge adulte si la communication ne s’établit pas entre les deux. Mais cela n’est pas une fatalité, en devenant mère à son tour, il est possible de casser ce schéma douloureux.

Un beau récit épistolaire sur l’amour maternel. En fin d’ouvrage, une petite interview d’une psychologue ethnologue dresse les portraits des différents amours maternels existants.

Petite anecdote  que j’ai appris dans ce livre et que j’aimerai partager avec vous : à l’intérieur des pépins de pommes se trouve une petite amande comestible. Ma jeune fille de 5 ans aime désormais ce petit moment de partage complice, même s’il est assez difficile pour moi de lui  récupérer cette amande vue la taille du pépin. 

Sale comme une image, Sylvie Baussier

Images de soi

Résultat de recherche d'images pour "sale comme une image"Lisa rentre du collège plus tôt, elle ne rentre pas à l’heure habituelle, l’absence d’une enseignante. Elle entend ses parents parler derrière la porte. Elle écoute… Quoi ? Sa photo utilisée ? Retrouvée  dans l’ordinateur d’Étienne, un ami de la famille depuis des années ? Lisa se sent salie par cette photo qu’ Étienne a apparemment retouchée dans son ordinateur, seule sa mère a pu la voir. Elle se sent aussi trahie par ses parents qui hésitent à porter plainte contre Étienne sous prétexte qu’ils feraient voler sa vie en éclat et ayant du mal à accepter la situation. Lisa n’en revient pas et décide alors de fuguer avec sa sœur, son double, Sali. Le récit prend alors des allures de road movie, une quête de soi à travers une succession d’images.

Ce court récit évoque plusieurs thématiques. Tout d’abord, c’est la question de l’image de soi qui est au centre de l’histoire, image de soi au sens large, dans la vie réelle et virtuelle soit l’identité numérique. Étienne, sympathique, rigolo, généreux, ami proche de la famille, tel un frère, s’avère être en réalité un prédateur, fréquentant les réseaux de pédopornographie. Depuis toutes ces années, qui n’aurait soupçonné que cet homme si gentil voyait les enfants comme des proies ?

Quant à la question de l’identité numérique, Lisa tente de chercher sa photo retouchée par Étienne par peur qu’elle soit publiée sur Internet et que tout le monde puisse la voir, que son image soit définitivement salie. Heureusement, elle ne trouve rien. Mais elle se sent tout de même sale lorsqu’elle imagine la photo de son visage utilisée à son insu, montée sur le corps d’une fille étant la cible de prédateurs. Lors de son périple qu’elle réalise pendant sa fugue, Lisa tente de laver son image par les nombreux selfies qu’elle prend. Car l’identité numérique figure désormais un double de soi palpable, un double de soi telle la sœur imaginaire de Lisa, Sali, avec laquelle elle fugue. Sali ne constitue pas un personnage imaginaire mais tout simplement le double numérique de Lisa, son double justement sali par Étienne qu’elle tente de nettoyer durant son périple par les clichés qu’elle capte d’elle, dans le train, à la gare, dans le bus, à Lille, etc. L’auteure utilise ce procédé pour prouver l’existence réelle d’un double de soi apparu avec le numérique, un double dépendant l’un de l’autre, vivant en parfaite adéquation.

Outre la question de l’identité numérique, Sale comme une image nous parle aussi de la relation parents-enfants. Le rôle des adultes, des parents n’est-il pas de protéger les enfants ? L’indécision des parents face aux révélations sur leur vieil ami laisse planer le doute et interroge le lecteur.

Sylvie Baussier a choisi d’aborder cette question de l’identité numérique et de l’image de soi par la problématique de la pédopornographie complétant aisément le propos principal  amené par ce court roman relatif à l’image de soi.  La pédopornographie est « le fait de représenter des actes d’ordre sexuel impliquant un ou plusieurs enfants ». Nous nous situons uniquement dans la représentation, dans l’utilisation d’image. Étienne n’a d’ailleurs jamais eu un comportement physique déplacé envers Lisa. L’auteure tourne son récit autour de l’image et de la représentation virtuelle.

En quelques pages, l’auteure offre une réflexion pertinente et bien menée autour de la thématique de l’image, l’image de soi et de sa représentation sur les réseaux, un récit pertinent sur l’identité numérique et le double numérique de chacun. Ce court roman, bien que sa couverture rose et son petit format puisse tenter de jeunes lecteurs, s’adresse principalement à des élèves de 3ème et des lycéens au vu de la réflexion complexe et du propos échangé. Il constitue par ailleurs un très bon outil pour réfléchir autour de l’identité numérique avec des lycéens.

Enregistrer

Comme des frères, de Sylvie Baussier

Les dévoreurs de livres dArsène : les chroniques des élèves du comité de lecture du blog

Comme des frères, de Sylvie Baussier

Comme des frèresVous êtes enfant unique ? Avez-vous déjà rêvé d’avoir un frère ? Patrick, enfant de dix ans,  oui,  c’est son plus grand rêve. Alors, imaginez sa surprise quand il découvre dans sa boîte aux lettres cette fameuse lettre mauve, venue d’Irlande, adressée à son père. « Elle sentait bon, avait un parfum lointain et entêtant. Un parfum que n’ont pas les e-mails […] Sans réfléchir, j’ai fourré la lettre dans ma poche ».

Quel secret de famille va-t-elle lui dévoiler ? Pourra-t-il compter sur ses amis Julienne et Mathieu pour mener à bien son projet ? Si vous voulez le savoir, ouvrez ce livre et parcourez-le, en compagnie de Patrick.

C’est un très bon livre. Ce que j’ai aimé, ce sont les aventures que Patrick va vivre, les projets qu’il va mener pour trouver ce frère tant rêvé, à quel point il est curieux de le connaître.

Voyage, relations familiales, secret de famille, amitié, voilà tous les ingrédients de ce petit livre émouvant qui se lit comme une petite enquête.

Chloé, 5ème – 12 ans – membre des Dévoreurs de livres d’Arsène

Les couleurs de la liberté, de Sylvie Baussier et Pascale Perrier

Un monde inspiré

Afficher l'image d'origineDans ce monde-là, Sheridan, chaque habitant porte autour du cou un « collien » dont la couleur retranscrit la personnalité. Le liseré qui l’entoure change en fonction des émotions ressenties sur l’instant. On ne peut donc rien cacher de ses pensées, de ses sentiments exposés à la vue de tous. Dans ce monde-là, la couleur marron a été bannie, c’est la couleur des tyrans.
Juliaca doit bientôt passer l’épreuve qui la rendra adulte. Elle a demandé à partir au pays de Valtavie, sauvage et isolé. Pourtant, c’est une autre épreuve qui l’attend : peindre sa famille en « chassant les ombres »… De quelles ombres s’agit-il ? Celle de son frère de 6 ans dont le collien vire indubitablement au marron ? Celle que sa mère quasi dépressive laisse autour d’elle ? Pour le savoir, elle accompagnera sa sœur, apprentie liseuse de collien, et son jeune frère dans ce pays dont elle rêve. Ils espèrent découvrir le refuge des Inspirés qui semblent avoir les réponses à toutes leurs questions. Et ainsi sauver leur frère de Nulle Part, lieu secret et violent où sont enfermés tous les « colliens » marron en attente de la mort… Cette quête permettra également aux deux soeurs que tout semble opposer et qui ont du mal à communiquer, à mieux se connaître, à tenter de s’apprécier sans jalousie.
Je ne sais pas pourquoi, avec l’illustration de couverture, je m’étais mis en tête qu’il s’agissait d’une histoire de ségrégation raciale… Pas du tout ! En lisant le résumé, j’ai compris qu’il s’agissait d’un livre de science-fiction, qui me faisait penser à Matin Brun de Franck Pavloff ou La bonne couleur de Yaël Hassan. Dans les trois, la couleur marron a une signification très profonde. Ici, le message qui est donné est un message de tolérance. Les gens ne peuvent pas être catalogués, mis dans des cases définitives. Toutes les personnalités ont du bon et du mauvais, et ce qu’il faut réussir à faire, c’est cohabiter en fonction des valeurs et des failles de chacun. Et que les points faibles peuvent aussi être des points forts, si on les accepte comme faisant partie de soi. Et surtout, laisser aux gens une chance d’évoluer et de changer.
En fait, je n’ai pas été déçue du tout. J’ai lu ce livre d’une traite. Un bon roman de science-fiction pour les 4ème-3ème.