Jean de Florette, de Marcel Pagnol

La guerre de l’eau

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Marcel Pagnol signe là encore un livre fort, ayant toujours pour décor la Provence, si chère à son cœur, mais sur fond de tragédie familiale. Ne pénètre les terres du sud qui veut. Un homme de la ville, Jean Cadoret, un amoureux de la nature, descend dans les collines d’Aubagne, dans le village des Bastides blanches, pour prendre possession d’un terrain qu’il vient d’hériter. Il est parisien et digne descendant du vieux Pique-Bouffigue, associal, grossier et querelleur dont la mort n’est regrettée par personne au village. La terre qu’il laisse est très convoitée car elle est belle et arrosée par une source cachée. Un conflit d’intérêt va alors éclater entre Jean Cadoret et Ugolin, un voisin naïf et laid, qui rêve de s’approprier ce bien. En effet, celui-ci veut se lancer dans le commerce des fleurs qui peut lui rapporter gros mais qui est trop coûteux en eau. Il possède bien des terres mais elles sont arides donc peu appropriées à ce qu’il veut entreprendre. Cette parcelle serait une aubaine pour lui. Jean Cadoret installe toute sa petite famille et se lance dans l’élevage de lapins. Ce projet est mal vu surtout par Ugolin et son oncle « le papet », un homme cupide, qui décident de tout mettre en œuvre pour faire tomber le Parisien, notamment en bouchant la source … Ils sont prêts à tout pour que Jean sombre dans le désespoir, pour qu’il reparte à la ville … Mais le citadin s’obstine malgré les obstacles et la méchanceté des deux hommes. Il se tue à la tâche. Ne renonçant pas, il continue à planter et compte sur ses cultures pour vivre. Il ignore tout de la présence de cette source, il ne sait pas ce que cache sa propriété. Quand l’eau commence à manquer, c’est le début du drame. L’étranger va tomber, pris au piège dans un véritable complot. La nature décidera elle-même de tout au final.

Ne cherchez pas à être bercés par les belles couleurs de la Provence, le chant des cigales, le bel accent du sud qui nous fait tant rêver. Oh je mentirais bien sûr si je vous dis que tout ceci n’apparaît pas ! Mais la perversité des hommes met tout cela au second plan. Pagnol met l’accent sur le dur travail des paysans, la vie difficile, la vie de labeur qui use les corps. Il dépeint l’Homme avec ses bons et ses mauvais côtés. L’ambiance est douloureuse, pesante.

Jean de Florette est une tragédie touchante tant par l’opposition des caractères des personnages que par la cruauté du récit.

Là encore, il faut souligner la magnifique adaptation cinématographique de Claude Berri, en 1986, avec des acteurs prodigieux qui ont porté haut l’oeuvre de Pagnol. Un pur bijou emmené par Yves Montant, Daniel Auteuil et Gérard Depardieu.

A suivre Manon des sources.

La gloire de mon père, de Marcel Pagnol

« Ce n’est pas de moi que je parle, mais de l’enfant que je ne suis plus…. »

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La gloire de mon père est une autobiographie romancée de Marcel Pagnol. Des souvenirs d’enfance qui débutent dès la naissance de l’auteur. Marcel Pagnol né en 1895, décrit ses années à l’école, sa vie à Aubagne puis à Marseille. Plus exactement, il parle de ceux qui l’ont entouré. Son père Joseph, son héros, est instituteur et sa mère Augustine, qu’il aime plus que tout, est couturière.

Et puis il y a les vacances dans le village de La Treille en 1904 . Des vacances en Provence avec ses parents, ses deux frères et sa sœur, sa tante et son oncle, dans une maison de campagne la «Bastide neuve». Augustine étant de santé fragile, la famille a décidé, par la suite, de s’installer dans ce bourg pour qu’elle vive dans un endroit calme et agréable. La maison est vide et l’installation donne lieu à des situations cocasses. Elle deviendra vite la maison du bonheur, Marcel Pagnol y passera les plus belles années de sa vie.

Arrivés sur les lieux, Marcel et son frère vont tomber amoureux des paysages, des collines. Ils passent leur temps à observer la nature, à jouer aux Indiens. Ces vacances vont marquer à jamais le petit Marcel, notamment le jour de l’ouverture de la chasse. Son père, piètre chasseur, réussira à tuer un couple de Bartavelles. Un doublé qui sera fêté par tout le village et qui fera de son père un héros. De cet événement découlera le titre de l’ouvrage.

Marcel Pagnol a eu une enfance sans souci, attrayante car il n’y avait pas cette peur du lendemain. La vie est rude mais il y a du travail et chacun arrive à s’en sortir. La famille est unie. Le père prend une grande place dans ses souvenirs, un père qu’il admire tant, auquel il voue un amour si fort. Un père qui a quelques défauts mais qui le rendent si humain. La plume de l’auteur est légère et nous fait ressentir toute cette douceur, cette harmonie qui lie cette famille. C’est le point de vue d’un enfant aventureux sur le monde adulte qui fait de ce roman un pur régal. L’auteur a su nous transmettre son innocence, ses découvertes, ses émotions en gardant des mots d’enfant. C’est l’enfant qu’il a été qui parle et non l’adulte qu’il est devenu. Un tableau presque irréel tant tout respire la joie, la simplicité, la quiétude.

Quand j’ai lu pour la première fois ce roman, je suis partie en Provence avec Marcel Pagnol. J’ai emprunté les mêmes chemins escarpés, j’ai été éblouie par les mêmes paysages, j’ai senti les mêmes odeurs, j’ai pleuré, j’ai ri… Un récit émouvant, rempli d’émotions. Marcel Pagnol découvre son père, l’amour, le savoir. C’est un beau parcours initiatique de l’amour avec son père. L’adaptation cinématographique de Yves Robert, en 1990, m’a extrêmement charmée tant la restitution des couleurs et de la musique de Pagnol était forte.

A suivre le château de ma mère et le temps des secrets.